Le dimanche 28 juin 2015, les élèves de Temps Danse Asnières se sont levées tôt pour arpenter les couloirs d’un temple de la Danse Classique : l’Opéra Garnier. 
Suivez le guide !

C’est sous un grand soleil que les danseuses se sont rassemblées devant l’entrée de la rotonde de gauche, entrée réservée, à la fin du XIXème siècle, aux abonnés.

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La guide explique d’abord que Napoléon III était à l’origine de la construction de cet Opéra. La salle Le Pelletier, dédiée aux représentations de musique et de danse, ayant été détruite, l’Empereur avait lancé un concours anonyme pour définir quel architecte dessinerait les plans. Charles Garnier, alors inconnu du grand public, avait remporté le concours. Avec un style dit « éclectique », mélangeant entre autres baroque et renaissance italienne, Charles Garnier avait élaboré les plans d’un lieu permettant avant tout au public d’être vu.

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Les élèves de Temps Danse Asnières découvrent donc, avec stupéfaction, que la fonction principale de l’Opéra de l’époque n’était pas d’admirer ce qui se passe sur scène mais d’admirer les richesses et le panache de ceux qui constituaient le public. Les deux miroirs, encadrant la sortie de la rotonde qui donne sur le grand escalier, permettaient aux nobles de réajuster leurs parures.

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Les abonnés, qui se rendaient en moyenne trois fois par semaine à l’Opéra, montaient l’escalier en respectant un réel protocole : les femmes, dans leurs robes à « faux culs », tendaient la main aux hommes afin d’exposer leurs bagues ornées de diamants. Il était déconseillé aux hommes d’abuser de l’absinthe cachée dans le pommeau de leur canne avant la représentation, puisque cette montée des marches se faisait sous les regards des spectateurs répartis sur les balcons qui encadrent l’escalier. Une fois arrivés sur le palier, les couples étaient applaudis avant d’entrer dans la salle.

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Au pied de ce grand escalier, la guide attire l’attention de son auditoire sur la statue de salamandre située à l’extrémité de la rampe. La salle Le Pelletier ayant été ravagée par un incendie, Charles Garnier avait pris les devants en introduisant ici ce « grigri » censé protéger le lieu des flammes.

La guide souligne aussi le prestige de cette salle d’entrée, renforcé par les trente marbres provenant de huit pays différents, ainsi que par les représentations picturales de personnages de la mythologie grecque. Le dieu Apollon lui-même accueille le public dans son temple.

Quand les élèves entrent dans la salle de spectacle, ils sont ébahis devant les dorures, les rangées de fauteuils de velours rouge, le lustre immense et le plafond peint par Chagall en 1964.

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Puisque « exhiber leur noblesse » était la principale préoccupation des spectateurs de la fin du XIXème siècle, les places les plus chères étaient celles situées dans les loges et au premier balcon, zones que l’on pouvait observer de toute part de la salle. Les places au « poulailler » étaient déjà les moins prisées puisque le public y passait incognito. Les femmes, encombrées de leurs robes et chapeaux ne pouvaient s’asseoir au parterre, leurs tenues prenant trop de place.

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La guide indique aux danseuses la loge impériale, encadrée de statues, et s’arrête un instant sur la loge 5, loge louée par « le fantôme de l’Opéra ». La légende raconte qu’un pianiste et sa compagne, ballerine, avait été surpris par les flammes lors de l’incendie de la salle Le Pelletier. La ballerine avait péri tandis que le pianiste, défiguré, n’avait pu retrouver sa place dans la société, étant considéré comme un monstre. Il s’était alors réfugié sous l’Opéra en construction et aurait assisté à des représentations lui rappelant sa muse. La Direction de l’Opéra a longtemps affirmé avoir reçu des lettres signées de ce « fantôme ». Ce dernier serait décédé dans son antre secret, dans les cuves situées sous le bâtiment. Aujourd’hui, chacun connaît cette histoire relatée par Gaston Lerou dans son livre rédigé en 1910.

Le lustre de huit tonnes attire autant l’œil des visiteurs que le plafond auquel il est rattaché. En 1964, André Malraux, alors Ministre des Affaires Culturelles, avait commandé ce plafond au peintre Marc Chagall pour remplacer l’ancien. Chagall avait érigé une œuvre à la gloire de Paris et de l’Opéra. Néanmoins, les couleurs vives utilisées tranchaient nettement avec le reste de la décoration, ce qui suscita alors une vive polémique. Pourtant, l’objectif d’André Malraux fut atteint puisque le public se déplaça en masse pour venir découvrir l’objet du scandale.

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Avant de quitter la salle, une élève interroge la guide sur les dimensions de la scène. Cette dernière mesure 27m de profondeur, 48,5m de largeur et son cadre est de 16m. Des dimensions qui font rêver ! A l’inverse, les danseuses de Temps Danse Asnières, sont ravies de ne pas devoir évoluer, pour chaque spectacle de fin d’année, sur une scène à l’italienne avec 2% de dénivelé !

Le groupe emprunte ensuite l’entrée réservée à Napoléon III, pour rejoindre la Bibliothèque. La sobriété de ce passage contraste avec le reste du lieu. La guide explique que Charles Garnier avait été contraint de terminer rapidement et avec moins de moyens financiers. Or, Napoléon III étant décédé avant la fin des travaux, cette partie du bâtiment n’avait pas été achevée.

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Après un rapide passage devant les maquettes de décors contenues dans la Bibliothèque, les danseuses rejoignent le Grand Foyer.

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Inspirée de celle de Versailles, la décoration de cette pièce regorge de dorures. Mais ce qui semble être un étalage d’or véritable n’est qu’une illusion ! Charles Garnier avait mis au point le procédé de « dorure à effets », permettant de n’utiliser que 2,5kg d’or pour l’ensemble de la salle.

Ce Grand Foyer accueillait les spectateurs durant les entractes qui duraient, à l’époque, pas moins d’une heure et demie. Cette pièce surchauffée permettait de maintenir les spectateurs dans une ambiance conviviale jusqu’à la deuxième partie de la représentation. Les femmes n’y avaient pas accès et devaient rester dans la salle de spectacle. Mais lors de l’inauguration le 5 janvier 1875, Isabelle II d’Espagne voulut admirer les œuvres de Paul Baudry qui ornent le plafond de ce Grand Foyer. Par conséquent, elle sortit de la salle, suivie du reste de la gente féminine. Ces messieurs, outrés, se réfugièrent sur les balcons extérieurs !

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A la sortie de cette salle, la guide déplore l’état des mosaïques qui recouvrent le sol. Celles-ci sont parsemées de fissures résultant des vibrations du métro. Heureusement, la structure du bâtiment est solide et les céramiques au plafond sont intactes. La guide précise que le bruit du métro ne s’entend pas dans la salle, tout comme la musique n’atteint pas les sous-sols…ce qui est bien dommage ! La vision de passagers faisant le silence dans la rame, pour écouter les échos provenant de la scène de l’Opéra, fait sourire certains.

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La visite s’achève devant l’accès réservé désormais à tous les spectateurs. A l’époque, ceux qui n’appartenaient pas à la noblesse entraient par là. Ils étaient contraints de sortir de leur carrosse au pied des marches extérieures, risquant ainsi de salir leur toilette en cas de pluie.

A peine la guide a-t-elle le temps de demander si certains ont des questions qu’un concert improvisé par une chorale d’étudiants, au sommet du grand escalier, l’interrompt. Les élèves de Temps Danse Asnières savourent cet instant de musique et de poésie dans ce lieu à l’acoustique exceptionnelle, regrettant néanmoins de ne pouvoir enchaîner avec une chorégraphie !

Enfin, les yeux écarquillés, les élèves terminent cette visite par une partie du bâtiment qui, finalement, témoigne à sa façon d’un certain héritage : la boutique ! Instant difficile pour le porte-monnaie devant ces quantités de livres et dvd dédiés à des siècles de Musique et de Chorégraphie.

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Ravies, les danseuses de Temps Danse Asnières quittent ce lieu, la tête pleine de dorures et de marbres, de velours, de mythologie, et bien sûr de Danse…

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